Chimpay, 11 novembre 2007

Lectures:
Exode 3,1-9.15
Épitre aux Romains 12,9-21
Luc 10,21-24

1. “A cette heure même, il tressaillit de joie sous l`action de l`Esprit Saint et il dit: ‘Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre’”.
Aujourd`hui, nous aussi, avec Jésus et toute son Église, nous tressaillons de joie dans l’Esprit Saint, et nous louons le Père, Seigneur du ciel et de la terre, qui a révélé aux petits, et non pas aux sages et aux intelligents du monde, les mystères profonds de sa vie et de son amour.
Aux petits, aux pauvres, aux assoiffés de justice, aux opérateurs de paix, aux persécutés, à ceux qui s’engagent chaque jour à vaincre le mal par le bien, Dieu transmet sa vie, c’est-à-dire la sainteté.
L’épisode dramatique du buisson ardent, absolument central dans la révélation de l’Ancien Testament, nous rappelle qu’il existe un abime, de fait insurmontable, entre la créature et le Créateur. Mais dans Jésus-Christ – le Fils de Dieu qui s’est fait petit et pauvre, et qui s’est humilié jusqu’à la mort sur la croix – l’abime a été comblé, et ceux qui croient en Lui peuvent puiser à la vie même de Dieu.

Aujourd`hui, nous célébrons ces prodiges de la grâce en un jeune araucan, Zeffirino Namuncurà, fils du Grand Cacique des Pampas: le Pape Benoit XVI, vers qui nous tournons notre pensée reconnaissante, a voulu que   ce jeune âgé de 19 ans soit inscrit aujourd’hui dans le Registre des bienheureux.
Ma qui est Zeffirino, et quel est “le secret” de sa sainteté?

2. Zeffirino – nous le savons bien – nait d’une famille fière et généreuse de la forte tribu des Indiens araucans, de la terre de Patagonie.
Si la sainteté a pu fleurir en lui, c’est parce qu’elle a trouvé un terrain fertile dans les qualités humaines propres à sa terre et à sa souche, une qualité dont il s’est fait charge et qu’il a perfectionné.
Il nous plait de voir dans le bienheureux Zeffirino toute l’histoire, souvent dramatique, de son peuple. Il résume en lui les souffrances, les anxiétés, les aspirations des Mapuches, qui rencontrèrent l’Évangile et s’ouvrirent au don de la foi précisément au cours des années de son enfance.
Rendre aujourd`hui grâce au Seigneur dans le bienheureux Zeffirino signifie également faire mémoire vivante et reconnaissante des anciennes traditions du peuple mapuche, fier et indomptable; et en même temps redécouvrir la fécondité de l’Évangile, qui ne détruit jamais les valeurs authentiques portées par une culture, ma les assume, les purifie et les perfectionne.
La vie même de Zeffirino est comme une “parabole” de cette vérité profonde. Zeffirino n’a jamais oublié d’être mapuche: pour lui, l’idéal suprême c’était de se rendre utile à son peuple. Mais la rencontre avec l’Évangile a fait croitre son aspiration fondamentale dans une perspective nouvelle: c’est ainsi qu’il arriva à souhaiter ardemment d’être salésien, et prêtre, “pour montrer” à ses frères mapuches “le chemin du ciel”.

3. Il choisit Domenico Savio comme modèle de vie. Cet élève bienaimé de Don Bosco fut proclamé saint par Pie XII en 1954, et avec lui était en quelque sorte canonisée la “recette simple” de la sainteté, que le “père et maitre des jeunes” remit un jour à Domenico. Une recette qui dit plus ou moins: “Sois toujours joyeux; fais bien tes devoirs d’étude et de piété; aide tes camarades”.

La joie, avant tout. “Il sourit avec les yeux”, disaient de Zeffirino ses camarades. Il était l’âme des récréations, auxquelles il participait avec créativité et enthousiasme, parfois même avec impétuosité. Il savait faire des tour de magie, ce qui lui valut le titre de “magicien”. Il organisait différentes compétitions, et apprenait à ses camarades sur la manière meilleure de préparer les arcs et les flèches, pour les entrainer ensuite au tir à la cible.

Don Bosco recommandait encore à Domenico Savio les devoirs d’étude et de piété. Dans le pensionnat salésien de Villa Sora, à Frascati, Zeffirino – qui avait pourtant quelques difficultés avec la langue italienne – réussit en quelques mois à devenir le deuxième de la classe. Dans son bulletin scolaire, apparait nettement son très bon résultat en latin: c’était une condition importante pour devenir prêtre.
La piété de Zeffirino était celle qui caractérise les milieux salésiens, plongeant des racines solides dans les Sacrements, et en particulier dans l’Eucharistie, considérée comme “la colonne” du Système préventif. Pour cette raison, Zeffirino acceptait volontiers la fonction de sacristain. Pendant les mois de son séjour à Turin, on le voyait s’arrêter des heures dans le Sanctuaire de Marie Auxiliatrice, en dialogue intime avec Jésus.

Pour finir, Don Bosco recommandait à Domenico d’aides ses camarades.
À cet égard, le témoignage d’un salésien, le père Iorio, est impressionnant. Trois jours avant la mort de Zeffirino, le père Iorio était allé lui rendre visite à l’hôpital Fatebenefratelli de l’ile Tiberina. Il entendit notre bienheureux, désormais à l’agonie, lui dire: “Père, bientôt je m’en irai, mais je vous recommande ce pauvre jeune, dans le lit près du mien. Venez souvent lui rendre visite… Il souffre beaucoup! La nuit, il ne dort presque pas, il tousse beaucoup…”. Et quand il disait cela, Zeffirino se trouvait en une situation bien pire, et ne pouvait pas du tout dormir.

4. Ceux qui entrent dans la Basilique du Vatican peuvent voir en haut, dans la dernière niche à droite de la nef centrale, une grande statue de saint Giovanni Bosco, qui indique l’autel et la tombe de saint Pierre. Près de lui se trouvent deux jeunes, l’un aux traits européens et l’autre aux traits typiques des gens de l’Amérique du sud. C’est évidemment une référence aux deux jeunes saints: Domenico Savio et Zeffirino Namuncurà. C’est la seule représentation de jeunes présente dans la Basilique du Vatican. L`exemple de la sainteté des jeunes est ainsi gravé dans le marbre, au cœur de la chrétienté, et avec lui est gravée la validité éternelle des intuitions pédagogiques de Don Bosco: en un siècle et demi, en Patagonie, tout comme en Italie et en beaucoup d’autres endroits du monde, le Système préventif a produit des fruits presque inattendus, a formé des héros et des saints.

5. Bienheureux Zeffirino, maintenant nous nous adressons à ton intercession puissante: soutiens notre chemin, pour que nous aussi, nous puissions suivre aujourd`hui le chemin de la sainteté, fidèles aux enseignements de Don Bosco.
Tu as touché les sommets de la perfection évangélique en faisant bien les devoirs de tous les jours. Tu nous rappelles ainsi que la sainteté n’est pas une chose exceptionnelle, réservée à quelques élus: la sainteté est la vocation commune de tous les baptisés, c’est le but difficile de la vie chrétienne ordinaire.
Fais-nous comprendre que, à la fin, il n’y a qu’une chose qui compte: être saints, comme Lui, le Seigneur, est saint.
Bienheureux Zeffirino, guide-nous, par ton regard souriant. Montre-nous le chemin du Ciel! Accompagne-nous tous ensemble à la rencontre avec ton Ami Jésus.

Amen!